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À propos de C.Deroubaix

Au diable, clichés et stéréotypes: décryptage d'un pays en pleine mutation. Christophe Deroubaix, journaliste à l'Humanité, suit l'actualité américaine depuis vingt ans.

Ce que propose Mennucci pour Marseille

Alors que le député a été désigné tête de liste du PS à l’issue du second tour des primaires (57,16% contre 42,84% à Samia Ghali), revoici (post déjà publié le 11 octobre) le contenu de l’entretien qu’il nous avait accordé il y a quelques semaines.

Pour un autre regard, vous pouvez visionner un excellent « portrait de campagne » réalisé par Filma: http://www.filma.fr/portraits-primaires-5-patrick-mennucci/

Bio Express

Né en 1955 à Marseille

Maire des 1e et 7e arrondissements depuis 2008

Député depuis 2012

Son site: patrickmennucci.fr

Sa formule qui résume le projet : « Une réponse de gauche pour développer l’égalité des Marseillais et du territoire et créer des richesses afin de les partager.»

Sa première décision en tant que maire de Marseille : « Convoquer une conférence sociale avec l’ensemble des organisations syndicales, parce que je n’oublie pas que le maire de Marseille est d’abord le patron de l’entreprise-mairie. Je mettrai cinq points à l’ordre du jour :

Reprofessionnalisation des emplois

Transfert des cantonniers, dans un premier temps à la Ville, puis aux mairies de secteur

Création d’une régie des petits travaux par mairie de secteur

Application de la loi PLM (Paris-Lyon-Marseille) en matière d’écoles : gestion et réparation des écoles par les mairies de secteur

Retour de des DSP (délégations de service public) à la Ville de Marseille. »

Les phrases-clés :

« Jean-Claude Gaudin ne connaît plus sa ville. Il connaît l’autoroute pour aller à Saint-Zacharie »

« La réponse à l’insécurité : diviser par deux le nombre d’habitants vivant en dessous du seuil de pauvreté.»

«Qui est à l’origine du clientélisme à Marseille ? Jean-Claude Gaudin et Jean-Noël Guérini »

INÉGALITÉS

« 80% de la responsabilité en incombe à la politique de Jean-Claude Gaudin. Et il continue. Il consacre  une partie de sa réserve parlementaire pour la ville. Où ? Au Port des Goudes (dans les  quartiers sud, fief de la droite, NDLR). Il pourrait se demander où on en a le plus besoin : à Saint-Louis, Saint-Antoine, La Savine (quartiers nord, NDLR) ? Jean-Claude Gaudin ne connaît plus sa ville. Il connaît l’autoroute pour aller à Saint-Zacharie (commune du Var où il réside, NDLR).

Il n’y a pas de politique municipale capable, seule, de redresser la ville. Ce qu’il faut, c’est du développement économique. Que faire en tant que maire ? S’inscrire dans la compétitivité territoriale. Créer un établissement foncier. Faire un travail de manager pour accueillir les entreprises. Bref, ce qui se fait partout. Demain, c’est la métropole qui décidera en matière de développement économique mais c’est le maire de Marseille qui aura la légitimité. Je m’y consacrerai totalement parce que je ne serai plus député.

En matière de transports, la métropole va toucher 50 millions de versement transport(VT) supplémentaires et l’aide de l’Etat sera de 50 millions. Si on fait un contrat de Plan avec le Conseil général et le Conseil régional, on peut dégager 130 à 140 millions supplémentaires. A partir de là, il faut faire un emprunt supplémentaire de 2 milliards : en consacrer 1,2 à l’intérieur de Marseille et 800 millions à l’extérieur. »

(Sur la proposition d’Eugène Caselli de demander à l’Etat de mettre deux milliards dans un fonds d’amorçage). « J’essaie d’être cohérent. L’Etat va déjà mettre 2,5 milliards sur la gare Saint-Charles pour la traversée souterraine de Marseille. Il ne donnera pas deux milliards à Marseille pour les transports même s’il mettra un peu d’argent. »

INSÉCURITÉ

« J’assume le fait que j’ai une réponse de gauche, que je suis fidèle aux convictions de mon courant politique qui a toujours estimé qu’à côté de la répression qui est indispensable, il faut s’attaquer aux conditions sociales qui déterminent la situation de la sécurité. Je suis sur la position qui est celle du parti socialiste et de la gauche en général depuis cent ans.

Manuel Valls ne croit d’ailleurs pas que l’on réglera les questions de sécurité à Marseille en ayant des positions policières. Les policiers pensent d’ailleurs la même chose. Pour moi, le problème est « simple »: nous avons, à Marseille, 30% de gens qui vivent en dessous du seuil de pauvreté. Dans le pays, c’est 15%. L’objectif de diviser par deux la pauvreté à Marseille conduit à limiter l’insécurité. Sur les Roms, je dis la chose suivante. Prenons des engagements avec la Commission européenne, qui finance très largement l’intégration des Roms, sur un certain nombre de familles que nous accueillerons, logerons et scolariserons. Une fois que l’on aura fait ça, on pourra voir qui veut s’intégrer ou pas.

Pour résumer, je pense que les réponses à l’insécurité sont d’ordre sécuritaire et d’ordre social. On doit apporter une réponse globale. Je note que la prévention est une responsabilité municipale dans laquelle l’équipe actuelle n’investit pas.

Je trouve toutes les propositions faites ces derniers temps (armée, drones, police montée) ridicules. Pour moi, quand Samia Ghali en appelle à l’armée, elle pousse un cri de désespoir. Elle est suffisamment au courant pour savoir que l’armée ne peut rien à voir là-dedans. Chaque fois que l’armée est intervenue, elle l’a fait sur la base d’une loi d’exception (au Brésil, dans les années 20 en Sicile). Donc, j’entends le cri mais ça commence à faire long…

Sur la légalisation du cannabis, non, je ne revois pas ma position. Mais je ne m’oppose pas à un débat public. Je pense que ça ne réglerait rien. Pour s’en assurer, il ne me parait pas scandaleux de mener un débat public. »

CLIENTÉLISME

« Ma définition ? C’est quand on sollicite ou obtient une prestation, un emploi, un logement en échange non de ses compétences ou de son droit mais du soutien que l’on apporte à la personne qui vous le donne. Je prendrai des mesures pour mettre fin à cela, comme des fiches de poste dans laquelle on décrit avec précision l’emploi recherché et la qualification nécessaire. On évite ainsi des recrutements au petit bonheur la chance. J’instituerai également des commissions pour l’attribution des logements sociaux et des places en crèche.

Qui est à l’origine du clientélisme à Marseille ? Jean-Claude Gaudin et Jean-Noël Guérini dans un autre cadre. Non pas que le système n’existait pas avant eux mais ils sont arrivés au pouvoir après les lois de décentralisation et ça s’est accéléré.
Avec FO, Gaudin a complétement laissé faire. Il y a désormais une « cogestion » de la ville. Je rappelle qu’au départ, Gaston Defferre est opposé à la création de ce syndicat et qu’il garde des hommes à lui au sein de la CGT. Puis quand il devient patron de la mairie, il voit en FO un syndicat « jaune ». Il s’en sert. Sous Gaston Defferre, FO n’est pas en cogestion. FO obéit à Gaston Defferre. C’est tout de même une nuance de taille. Il n’y a que sous Vigouroux que FO se comporte comme un syndicat normal. Puis, sous Gaudin, l’organisation syndicale prend le pas sur l’organisation politique. Beaucoup des choses que nous devons affronter tiennent à une période que l’on n’arrive pas à dépasser. Je ne dis pas que lorsque j’arriverai à la mairie, FO n’existera plus. Je dis qu’elle existera en tant que force syndicale, point.

Mais je répète : Gaudin n’est pas dans une logique defferriste parce que Defferre dirigeait FO. De la même manière, Guérini n’est pas dans une logique defferiste. Defferre organisait son pouvoir autour de barons mais il ne les humiliait pas. Il avait un rapport de « primus inter pares ». Guérini n’a jamais eu cette capacité politique car personne ne le reconnaissait comme « primus » par son intelligence ou son courage. Il a toujours été obligé de taper sur les gens pour les obliger à faire les choses. »

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Cinq idées reçues sur Marseille

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Comme la vérole sur le bas clergé, stéréotypes et clichés s’abattent sur Marseille. Tentative de déconstruction avec cet article publié dans l’Humanité Dimanche du 17 octobre 2013.

La formule fait mouche. « J’ai parfois l’impression que les journalistes parlent de Marseille comme Sarkozy parlait de l’Afrique ». Elle est signée André Donzel, sociologue, l’un des plus fins connaisseurs de Marseille. Il y a deux ans, dans les colonnes de l’Humanité, le cinéaste Robert Guédiguian s’insurgeait : « C’est toujours la mauvaise réputation. C’est toujours l’air de la Calomnie. On disait ça de Marseille il y a deux siècles ou trois ou dix. Parce que c’était une ville frontière et presque hors la frontière. Si on la pousse à la mer, en Méditerranée, cette ville n’est pas en France. Il y a quelque chose qui sent mauvais, toujours, dans cette ville. Il y a quelque chose de la cour des miracles, de populaire, de voyou, de canaille, d’étranger, bien sûr. Donc, cette mauvaise réputation se poursuit. »

L’homme de recherche et l’homme de cinéma disent la même chose : Marseille la ville populaire, insoumise, cosmopolite est perpétuellement affublée des pires stéréotypes. Ceux-ci ne sont pas que le fruit d’une certaine paresse intellectuelle. Ils constituent la pierre angulaire d’un discours de stigmatisation des plus démunis et de repli identitaire.

Alors que la campagne pour les élections municipales commence avec, dimanche 20 octobre, le second tour des primaires socialistes, il semble plus utile que jamais de briser les reins de quelques-unes de ces idées autant reçues que fausses.

 « Marseille, ville pauvre »

En effet, 28% des habitants de la deuxième ville de France vivent sous le seuil de pauvreté tandis que la moitié ne sont pas assujettis sur l’impôt. Mais si l’on élargit la focale, on s’aperçoit que cette « ville pauvre » est aussi une « ville de riches ». Après Paris, Neuilly et Lyon, Marseille est la ville de France qui compte le plus de contribuables soumis à l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) : en 2010, 6 635 aux dernières nouvelles pour un patrimoine moyen de 1,73 million d’euros. Soit un total de 11,5 milliards.

« Marseille n’est pas une ville pauvre mais une ville inégalitaire », rappelle  André Donzel (1). Elle est même la plus inégalitaire des grandes métropoles françaises, si l’on s’en tient à l’instrument de mesure constitué par le coefficient de Gini. Avec 0,436 (pour une moyenne de 0,289 en France), Marseille s’inscrit dans la moyenne… des Etats-Unis et s’avère posséder une structure sociale aussi inégalitaire que celle de Los Angeles. « L’écart continue de se creuser, analyse le chercheur. On est passé de 1 à 10 en 2000 à 1 à 15 aujourd’hui ».

Ce fait apporte un éclairage particulier à la question de l’insécurité. Les grandes métropoles où se déploient les violences sont également les plus inégalitaires : Rio de Janeiro, Johannesburg, Los Angeles.

« Marseille, capitale du crime »

Le traitement  médiatique des règlements de compte pourrait laisser penser que Marseille, sous la coupe réglée de bande de trafiquants armés jusqu’aux dents, est à feu et à sang. Il ne s’agit évidemment pas de minorer ou banaliser l’assassinat de jeunes gens mais il faut constater que l’activité criminelle à Marseille est aussi vieille que le développement du port de commerce au milieu du XIXe siècle. Après une baisse dans les années 90 et 2000, le nombre de « règlements de compte entre malfaiteurs » (dénomination officielle de la statistique) retrouve, depuis plusieurs années, ses niveaux des années 80. Pour le reste des catégories statistiques concernant les « homicides et tentatives d’homicides pour voler ou à l’occasion de vols », la deuxième ville de France affiche un taux équivalent à celui de Paris, juste derrière… l’Isère. « Les règlements de compte ne sont pas l’arbre qui cache la forêt, comment le sociologue Laurent Mucchielli, fondateur de l’Observatoire régional de la délinquance et des contextes sociaux. Mais il y a bien un gros arbre… »

« La délinquance des cités, c’est la source du problème »

Là aussi, la tentation de l’amalgame est sinon tentante, du moins fortement encouragée par certains discours publics. Il semblerait parfois que les « cités » soient les grandes organisatrices du trafic de drogue. Or, elles ne servent que de relais de sous-traitance à un trafic de plus en plus mondialisé. Avec le passage de l’héroïne – la fameuse French Connection des années 50 à 70 – à la vente massive de cannabis, le grand banditisme s’est réorganisé. Il garde la haute main sur l’organisation générale mais a, selon Philipe Pujol, journaliste à La Marseillaise, « sous-traité la partie la plus difficile, la revente au détail ». Les réseaux « des cités » ne sont ainsi que des PME du trafic dépendantes des donneurs d’ordre du grand banditisme. Les règlements de compte indiquent-ils que la manne à se partager enfle ? Au contraire, souligne le journaliste, plus le gâteau est restreint, plus on s’entretue pour une part. Le développement des trafics a-t-il pour conséquence d’irriguer les cités de sommes folles, comme on peut aussi l’entendre ? En revanche, les bailleurs sociaux l’ont constaté : lorsqu’un réseau est démantelé, le nombre de loyers impayés explose le mois suivant.

« Vote FN, vote populaire »

C’est l’un des sophismes à la mode : le FN est fort à Marseille, Marseille est une ville populaire donc le FN est fort dans les quartiers et milieux populaires. Coupons court : à Marseille, le FN réalise ses meilleurs scores dans les quartiers pavillonnaires dans lesquels habitent des couples de salariés moyens, majoritairement propriétaires et dans une moindre mesure, dans les noyaux villageois à la population vieillissante. En revanche, dans les cités populaires des quartiers nord, Marine Le Pen a été systématiquement devancée, lors des présidentielles de 2012, par Jean-Luc Mélenchon.

« Le socle historique du FN en Paca, c’est la petite bourgeoisie (artisans, commerçants, petits chefs d’entreprise) et les rapatriés d’Afrique du Nord. C’est la radicalisation d’une frange de la droite », souligne Joël Gombin, doctorant et auteur d’un mémoire sur le vote FN dans les Bouches-du-Rhône. Encore aujourd’hui, ajoute-t-il, « le vote FN est utilisé comme une manière de voter à droite quand on trouve la droite pas convaincante». A Marseille, le total droite-extrême droite est stable de 2007 (47,5%) à 2012 (47,2%) : Sarkozy perd sept points, soit le gain du FN. Désormais, les scores de l’extrême-droite sont plus importants dans les « banlieues » résidentielles et huppées de Marseille que dans la deuxième ville de France. Lors des élections cantonales de 2011, c’est à Ensués-la-Redonne que le parti des Le Pen a enregistré son meilleur score. Ce havre côtier est également celui qui possède le plus haut revenu moyen de la communauté urbaine de Marseille…

« Le clientélisme, c’est le guérinisme »

La justice tranchera. Le président socialiste du conseil général, Jean-Noël Guérini, a été mis en examen à trois reprises dans une affaire qui mêle trafic d’influence et détournement de fonds publics. Une partie de la campagne des primaires socialistes s’est jouée sur la rupture avec le système clientéliste. Patrick Mennucci, Marie-Arlette Carlotti et Eugène Caselli en ont fait l’un de leurs principaux arguments. La justice a déjà tranché dans un autre dossier : la députée Sylvie Andrieux a été condamnée à trois ans de prison dont un an ferme pour détournement de fonds publics au détriment du conseil régional dont elle était une vice-présidente. L’élue a fait appel.

Pour le député socialiste Patrick Mennucci, le clientélisme, c’est aussi le « gaudinisme ». Il accuse le maire sortant d’avoir établi une « cogestion » de la ville avec le syndicat FO et, dans une lettre à Jean-Claude Mailly, dénonce « l’équipe dirigeante » des territoriaux qui considère les syndiqués comme des « agents électoraux » et dévoie « l’idéal du syndicalisme de la charte d’Amiens ».

Sachant que : Gaston Defferre a fait de FO le syndicat officiel à la mairie ; Sylvie Andrieux est la fille d’un baron du defferisme ; Jean-Noël Guérini est le neveu d’un conseiller général socialiste qui lui a cédé son canton… Question : ne s’agit-il pas plutôt du procès d’un defferisme qui n’en finirait pas d’agonir ?

(1) Auteur de « L’expérience de la Cité » (éditions Anthropos)

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Sur le clientélisme…

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Il y a quelque chose dans l’air politique et médiatique qui commence à me piquer au nez. Depuis dimanche soir, encore plus que les jours et semaines précédents, le mot « clientélisme » revient comme une ritournelle, sans que l’on ne sache plus bien de quoi il s’agit.

Mais il ne revient que pour décrire l’attitude d’une candidate, en l’occurrence Samia Ghali, et caractériser de manière exclusive la relation entre élus (une élue, surtout) et la population dans les quartiers nord de Marseille.

Loin de moi l’idée de minimiser l’emprise du clientélisme à Marseille. Il est une plaie. Une gangrène, qui aspire la substance du citoyen pour le transformer en consommateur dépendant. Il ne relève pas du fantasme, ce clientélisme, puisque la justice en a porté un pan à la connaissance du public en condamnant la députée socialiste et ancienne vice-présidente du Conseil régional, Sylvie Andrieux à un an de prison ferme et cinq ans d’inéligibilité pour détournement de fonds publics à des fins clientélistes. Elle a fait appel. Voilà un fait. La justice poursuit également ses enquêtes – dans lesquelles manifestement le clientélisme tient une part de plus en plus mineure face à des faits bien plus graves dans leur qualification juridique – concernant Jean-Noël Guérini, le président du conseil général. Voilà un autre fait.

Pour bien combattre la chose, encore faut-il bien la définir.

Lors de la série d’entretiens réalisé avec quatre des candidats aux primaires (lire ci-dessous), j’avais posé les mêmes questions à tous les candidats (voir plus bas). Parmi lesquelles, celle-ci : « On parle souvent de clientélisme. Quelle est votre définition ? » Patrick Mennucci avait livré la définition, me semble-t-il, la plus structurée et la plus juste : « C’est quand on sollicite ou obtient une prestation, un emploi, un logement en échange non de ses compétences ou de son droit mais du soutien que l’on apporte à la personne qui vous le donne ». Il aurait pu ajouter : « quand on offre »… Mais partons, tout de même, de là.

Lors d’une première déclaration, dimanche à 20h30, Marie-Arlette Carlotti a dénoncé « un fonctionnement à plein régime du clientélisme ». Qu’a donc à offrir Samia Ghali aux électeurs qui sont venus en très grand nombre dans les bureaux de vote des quartiers nord ? En tant que sénatrice, rien, à ma connaissance. En tant que maire d’arrondissements, guère plus, tant la fonction est vide de toute prérogative d’action concrète (logement, crèche). Des promesses-en-cas-de-victoire ? Peut-être. Je n’en ai pas été témoin mais peut-être. Un article de Médiapart a relaté, récemment, les doutes qui pèsent sur l’attribution de subventions du conseil régional au cousin de Samia Ghali pendant que celle-ci était vice-présidente du Conseil régional. Voilà encore un autre fait.

Autre question : en quoi est-ce clientéliste, au sens premier du terme, d’organiser le transport d’électeurs depuis leur domicile vers le bureau de vote ? « Moralement condamnable » ? C’est ce qu’a considéré René Stefanini, le secrétaire général de la Haute autorité des primaires. Mais clientéliste ? (Ma sollicitation auprès de l’équipe de Marie-Arlette Carlotti pour une « explication de texte » est restée sans suite).

La « fièvre civique » dont se moque Olivier Mazerolle dans la Provence, de ce matin, relève-t-elle du communautarisme ? Encore faudrait-il prouver que Samia Ghali a utilisé l’argument « venez voter pour moi parce que je suis arabe comme vous » plutôt que « venez voter pour moi parce que je suis une élue de proximité, je connais vos problèmes » ? Dans l’entre-deux, on peut formuler l’hypothèse qu’elle puisse également dire : « Venez voter pour moi parce que je suis des vôtres ». Des vôtres ? Socialement ? « Ethniquement » ? Je suis issue, comme vous, de ces quartiers ?

En tant que journaliste, j’ai recueilli, à plusieurs reprises, des témoignages de personnes m’affirmant que Samia Ghali jouait de cette corde « communautariste ». Je n’en ai pas été témoin mais je rapporte ici leur existence.

Tout comme j’ai recueilli, à de multiples reprises, des témoignages de personnes ayant vu et entendu Henri Jibrayel, conseiller général et député, dire qu’il allait régler pour la subvention de l’association d’untel, demander à tel autre si sa demande de logement avait bien aboutie comme prévu… Je n’en ai pas été témoin mais je rapporte ici leur existence.

Henri Jibrayel a apporté, dès dimanche soir, son soutien à Patrick Mennucci, héraut proclamé de la lutte anti-clientéliste. Il me semble que le fait a été plutôt remarquablement ignoré par la presse. Dans l’entourage du député arrivé deuxième du premier tour, on fait valoir trois arguments : nous ne refusons pas son soutien mais nous n’en faisons pas un argument (précision apportée samedi 19 octobre: Henri Jibrayel a été de toutes les initiatives publiques de Patrick Mennucci durant l’entre deux tours et une réunion publique a même été organisée dans son « fief » de Sainte-Henri. Difficile de prétendre que l’on n’en fait pas un argument…); il n’y a aucune négociation sur la ligne politique qui reste celle, notamment, de la lutte contre le clientélisme; son ralliement sur cette base engage Jibrayel…

Pour en revenir à Samia Ghali, aux quartiers nord et pour élargir un peu la focale… Peut-on envisager, un moment que, chez ces électeurs des quartiers nord (dans leur grande majorité membres des catégories populaires héritières de l’immigration) qui ont voté dimanche, , le sentiment d’abandon, de relégation, de stigmatisation se transforme en fierté d’exister politiquement, d’être représentés, d’enfin compter pour un ? Que, dans la complexité des mentalités et les difficultés de la vie quotidienne, cela puisse, chez certains, s’accompagner d’un intérêt personnel envisagé ? Que, peut-être, sûrement même, des élus les utilisent comme chair à canon électorale, comme une « clientèle » captive ?

Ce qui est certain, en tout cas, c’est que Marie-Arlette Carlotti a sacrément raison lorsqu’elle dit : « Quand il n’y a pas de politiques publiques cohérentes, égalitaires, pour tous, on remplace par le clientélisme ».  Marseille attend toujours…

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Tout (ou presque) sur les résultats du 1er tour des primaires

PARTICIPATION : 20731 votants

Commentaire : nous évoquions lors d’un précédent post « le spectre de la démobilisation générale ». Il a été conjuré dans des proportions qui ont étonné jusqu’aux organisateurs et candidats. Les plus optimistes tablaient sur 15000. Plus de 20000, c’était quasiment inespéré. Il faut croire que la volonté de changement de majorité municipale est telle parmi l’électorat de gauche qu’il a passé outre le climat de déception-désillusion-démobilisation créé par la politique du gouvernement.

(Pour les résultats officiels : http://resultats.lesprimairescitoyennes.fr/marseille/)

PARTICIPATION PAR SECTEUR

En nombre absolu de votants

13-14 : 4167

15-16 : 3468

1-7 : 3206

11-12 : 2613

6-8 : 2277

4-5 : 1988

9-10 : 1851

2-3 : 1617

En pourcentage (par rapport au corps électoral de la présidentielle 2012. Nous ne disposons pas du nombre d’inscrits pour cette année. Cela pourrait faire varier les chiffres, pas la hiérarchie).

15-16 : 7,58%

1-7 : 7,52%

13-14 : 5,19%

2-3 : 5,15%

Moyenne pour l’ensemble de la ville: 4,28%

4-5 : 3,72%

11-12 : 3,47%

6-8 : 2,94%

9-10 : 2,36%

Commentaire : les deux finalistes ont évidemment mobilisé dans leur secteur puisque l’on retrouve les meilleurs taux de participation dans les « 15-16 » (mairie de secteur dirigée par Samia Ghali) et « 1-7 » (mairie de secteur dirigée par Patrick Mennucci). Il valait donc mieux être maire de secteur que ministre, dimanche soir. Marie-Arlette Carlotti est bien implantée dans le « 4-5 » puisque son canton des Cinq-Avenues (elle y est élue depuis 1998) se situe en plein cœur de son territoire de même, évidemment, que la 5ecirconscription dans laquelle elle a battu Renaud Muselier en juin 2012. Cela n’a pas suffi, loin s’en faut puisque le taux de participation dans le « 4-5 » est inférieur au taux de la ville et qu’en nombre d’électeurs, ce secteur arrive en 6e position sur 8, ne devançant que les deux secteurs les plus à droite de la ville… A-t-elle payé l’impopularité du gouvernement ? Pour ce parlementaire PS croisé devant le siège de la fédération, dimanche soir, aucun doute : « Il y a une forme de sanction du gouvernement, évidemment ».

RESULTATS PAR SECTEURS

1-7 : Mennucci (41,57%), Carlotti (21,64%), Caselli (11,07%), Ghali (6,89%), Masse (3,52%)

2-3 : Mennucci (28,75%), Ghali (19,48%), Masse (16,69%), Caselli (16,32%), Carlotti (14,65%)

4-5 : Carlotti (45%), Mennucci (19%), Caselli (15,74%), Masse (9%), Ghali (7,5%)

6-8 : Carlotti (32,14%), Mennucci (27,44), Caselli (22,22%), Ghali (9,61%), Masse (6,71%)

9-10 : Caselli (26,25%), Carlotti (22,2%), Mennucci (20,2%), Ghali (16,58%), Masse (11,93%)

11-12 : Masse (27,24%), Caselli (20,1%), Ghali (16,8%), Carlotti (15,76%), Mennucci (13,96%)

13-14 : Ghali (35,7%), Masse (28%), Caselli (14,73%), Mennucci (9,35%), Carlotti (8,5%)

15-16 : Ghali (54,12%), Jibrayel (16,43%), Caselli (9,94%), Mennucci (8,24%), Carlotti (6,25%),

POIDS DES SECTEURS DANS LES SCORES

Voici le score réalisé par chacun des candidats avec sa « ventilation » géographique. A la reprise des secteurs municipaux, nous avons préféré redécoupé la ville en quatre zones: le centre-ville (1-2-3-4-5), le nord (13-14-15-16), le sud (6-7-8-9) et l’est (10-11-12). Le découpage peut évidemment prêter à discussion. Pourquoi ne pas avoir rattaché le 6e au « bloc » centre-ville ? Il nous a semblé qu’au-delà de sa géographie, son profil social, sociologique et électoral le rapprochait plus du bloc « Sud ».

Il faut lire les chiffres donnés comme un « camembert ». Exemple : Samia Ghali a réalisé 65% de ses voix dans les quatre arrondissements des quartiers nord. Nous avons également ajouté la part des voix obtenue par les candidats dans leur secteur d’élection, afin de juger de l’impact de leur implantation.

Samia Ghali : 5151 (25,25%)

Nord (65,32%), Sud (9,33%), Est (12,91%), Centre (11,68%), 15-16 (36,5%)

Patrick Mennucci : 4212 voix (20,65%)

Nord (16%), Sud (37,93%), Est (10,96%), Centre (35,13%), 1-7 (31,64%)

Marie-Arlette Carlotti : 3982 voix (19,52%)

Nord (14,36%), Sud (33,75%), Est (13,48%), Centre (37,69%), 4-5 (22,5%)

Eugène Caselli : 3380 voix, (16,57%)

Nord (28,37%), Sud (30%), Est (21,42%), Centre (20%), 2-3 (7,81%)

Christophe Masse : 2915 voix (14,29%)

Nord (43,43%), Sud (11,32%), Est (27,61%), Centre (17,63%), 11-12-13 (59,8%)

Commentaire : sans surprise, Samia Ghali est celle dont la terre d’élection a le plus compté dans le score (36,5%), mais à peine plus que Patrick Mennucci (31,5%). La sénatrice a surtout fait la différence dans les « 13-14 » (où « règne » Sylvie Andrieux, la députée condamnée, en première instance, à un an de prison ferme et cinq ans d’inégibilité dans une affaire de détournement de fonds publics du conseil général à des fins clientélistes, qui après avoir soutenu puis lâché Eugène Caselli a fait la campagne de Ghali) où elle compte 1100 voix d’avance sur le député du centre-ville. On retrouve le déficit de Marie-Arlette Carlotti dans les « 4-5 » qui ne pèsent qu’un petit quart de son score total. De tous les candidats, Christophe Masse est celui dont le score repose le plus sur son « fief » certes très peuplé. Notons qu’Eugène Caselli s’avère être le candidat le plus « complet ».

ET POUR LE SECOND TOUR ?

« C’est dans la poche pour Mennucci ». Personne ne l’a encore écrit de manière aussi franche, mais c’est un sentiment qui domine parmi nombre d’observateurs et parmi quelques équipes de candidats (devinez lesquels). Les ralliements de Marie-Arlette Carlotti (surtout) et d’Henri Jibrayel (pour la symbolique, vu son score) ont légitimé un peu plus le député du centre-ville dans sa posture de favori.

Christophe Masse et Eugène Caselli détiennent également une partie de la réponse. Leur refus s’appeler à voter pour l’une ou l’autre ne fait que le souligner un peu plus. Le premier n’a jamais fait de la lutte contre le clientélisme l’alpha et l’omega de sa campagne (euphémisme). Tout comme Samia Ghali. Le second s’est publiquement affronté à Patrick Mennucci sur le rôle du syndicat Force Ouvrière. Leur « appel » pèsera sans doute dans la balance. Mais, peut-être pas autant que la mathématique ne pourrait le laisser supposer. Nous y reviendrons.

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Primaires PS: le spectre de la démobilisation générale

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Une semaine après le scrutin cantonal de Brignoles, la désaffection de l’électorat de gauche pourrait marquer le premier tour, dimanche, du processus de désignation du candidat socialiste à la mairie de Marseille.

Comme toujours, l’arrière-saison a des goûts d’été mais une poignée. Pourtant, une poignée de Marseillais se retrouvent perdus dans un brouillard digne d’un « fog » londonien. Ils ont pour nom Carlotti, Mennucci, Ghali, Caselli, Jibrayel et Masse. Guides et aides de camp ont beau sortir cartes et lampes torches, le groupe n’y voit pas à un mètre. Comprendre : personne n’est en capacité d’assurer un chiffre de participation au 1er tour des « primaires citoyennes » qui se déroule dimanche 13 octobre. Une certaine fébrilité commence donc à gagner les équipes des candidats, sentiment qui n’est disputé que par l’incompréhension à l’égard de l’attitude de la direction nationale du PS. La campagne d’affiche annoncée ? Annulée. « On nous a finalement expliqué qu’il n’y en aurait pas car il aurait fallu intégrer aux frais de campagne du candidat désigné», témoigne l’un des candidats. De façon assez inexplicable, le pouvoir semble faire peu de cas du fait que la crédibilité d’une ministre – Marie-Arlette Carlotti, en l’occurrence, favorite des sondages – soit engagée… Peu informé, le citoyen marseillais désireux de voter devra se livrer à une autre chasse au trésor : trouver le bureau de vote, un seul par arrondissement, soit pour 50000 habitants en moyenne. Depuis dimanche soir, les mines se renfrognent encore un peu plus : l’électorat de gauche est resté à la maison à Brignoles, pourquoi sortirait-il à Marseille ?

27000 électeurs avaient participé aux primaires pour la présidentielles. Le rêve de se rapprocher de cette « jauge » a duré le temps d’un retour à la réalité. Puis, la barre a été ramenée à 20000. Puis à 15000. Le chiffre de la semaine ? 10000. « On mobilise les nôtres mais on croise les doigts », avoue un conseiller de l’un des favoris. « En-dessous de 10000, cela veut dire que dès dimanche, on a quasiment perdu les municipales », s’inquiète un proche d’un autre candidat. Elles n’étaient déjà pas gagnées d’avance…

Moins les électeurs s’annoncent nombreux, plus les rumeurs sur les agissements des réseaux « obscurs » galopent. Bref, tout le monde cherche à savoir où se trouve la « main invisible » de Jean-Noël Guérini, mis en examen à trois reprises par le juge Duchaine, en retrait du PS mais toujours président du Conseil général. On a vu son ombre planer sur la candidature-surprise de Christophe Masse. On le dit maintenant plaçant toutes ses forces derrière Samia Ghali, la sénatrice et maire des quartiers Nord. Toujours sans preuves.

Le thème du « clientélisme » a occupé une place centrale dans cette campagne des primaires. La ministre Marie-Arlette Carlotti, dont les demandes répétées d’exclusion de Jean-Noël Guérini du PS restent sans écho rue de Solférino, le député Patrick Mennucci et le président de la communauté urbaine de Marseille Eugène Caselli pourfendent régulièrement le « système clientéliste » qu’ils entendent mettre à bas via une « nouvelle gouvernance ». Ce « front commun » s’est pourtant lézardé sur la question du rôle de Force ouvrière, le syndicat « officiel » depuis l’ère Defferre. Lors du dernier débat, lundi soir, une passe d’armes a opposé Mennucci et Caselli, le premier accusant de ne pas l’avoir nommé vice-président à la propreté sur la base d’un refus de FO, le second jurant « les yeux dans les yeux » qu’il n’en était rien. Sur ce thème aussi, Samia Ghali cultive sa différence. Elle n’utilise jamais le mot et l’assume. « C’est quoi le clientélisme ? Quand c’est dans certaines classes, on se rend service. Quand c’est pour les pauvres, c’est du clientélisme. On ne combat pas le clientélisme avec des mots mais avec des politiques publiques».

Frictionnel sur le clientélisme, le débat entre camarades a viré à la course à l’échalote dès que le mot « insécurité » a été prononcé. Samia Ghali s’entête à vouloir faire appel à l’armée. Eugène Caselli verrait bien des drones dans le ciel de Marseille. Henri Jibrayel envisage une unité d’élite dans le genre SWAT de Los Angeles tandis que Christophe Masse a estimé qu’il n’était pas « dans la nature des Roms » (sic) de vouloir s’intégrer. Sur ce thème, c’est Mennucci qui s’est distingué en ne dégainant aucune mesure rocambolesque et en proposant un plan d’intégration de 1000 Roms à Marseille. Marie-Arlette Carlotti, elle, se veut « intraitable avec l’insécurité comme avec les causes de l’insécurité ».

Finalement, ils se sont tous retrouvés pour dénoncer la politique de Gaudin, la ville divisée et morcelée qu’elle produit. Tous ont produit des propositions en matière de développement économique, de vie culturelle, de « vivre ensemble », qui viennent s’échouer, comme autant de vagues, sur le récif incontournable des moyens. Prenons la question centrale des transports. Samia Ghali et Eugène Caselli s’adressent directement à l’Etat : la première demande trois milliards en douze ans, le second deux milliards dans un « fonds d’amorçage ». Patrick Mennucci estime que l’Etat ne mettra pas un sou supplémentaire à ce qu’il a déjà prévu pour la gare Saint-Charles et la rocade L2 et qu’il faudra en passer par un emprunt à l’échelle métropolitaine. Marie-Arlette Carlotti, a tellement intégré le « sérieux budgétaire » du gouvernement qu’elle milite pour «une réorientation vers des projets moins coûteux : je ne propose pas une grande extension du métro car cela coûte très cher. » Nous voilà bien loin du « plan Marshall » pour Marseille, proposé par Ségolène Royal lors de sa campagne présidentielle de 2007. Autre temps, autres promesses, autre engouement.

(Article publié dans l’Humanité daté du 10 octobre 2013)

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Les candidats aux primaires PS au « banc » d’essai » (4/4) : Patrick Mennucci

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Nous avons rencontré quatre des six candidats (les quatre premiers à s’être déclarés qui sont également ceux que les sondages placent en tête) aux élections primaires du PS dont le premier tour se déroule dimanche 13 octobre. Nous leur avons posé les mêmes questions articulées autour de trois grands thèmes (Inégalités-Insécurité-Clientélisme) qui se dégagent de cette campagne avec la volonté de creuser leur projet pour Marseille, en dehors de toutes considérations tactiques ou stratégiques. Publication par ordre alphabétique. Aujourd’hui : Patrick Mennucci, député, maires des 1e et 7e arrondissements.

Bio Express

Né en 1955 à Marseille

Maire des 1e et 7e arrondissements depuis 2008

Député depuis 2012

Son site: patrickmennucci.fr

 

Sa formule qui résume le projet : « Une réponse de gauche pour développer l’égalité des Marseillais et du territoire et créer des richesses afin de les partager.»

Sa première décision en tant que maire de Marseille : « Convoquer une conférence sociale avec l’ensemble des organisations syndicales, parce que je n’oublie pas que le maire de Marseille est d’abord le patron de l’entreprise-mairie. Je mettrai cinq points à l’ordre du jour :

Reprofessionnalisation des emplois

Transfert des cantonniers, dans un premier temps à la Ville, puis aux mairies de secteur

Création d’une régie des petits travaux par mairie de secteur

Application de la loi PLM (Paris-Lyon-Marseille) en matière d’écoles : gestion et réparation des écoles par les mairies de secteur

Retour de des DSP (délégations de service public) à la Ville de Marseille. »

Les phrases-clés :

« Jean-Claude Gaudin ne connaît plus sa ville. Il connaît l’autoroute pour aller à Saint-Zacharie »

« La réponse à l’insécurité : diviser par deux le nombre d’habitants vivant en dessous du seuil de pauvreté.»

«Qui est à l’origine du clientélisme à Marseille ? Jean-Claude Gaudin et Jean-Noël Guérini »

INÉGALITÉS

« 80% de la responsabilité en incombe à la politique de Jean-Claude Gaudin. Et il continue. Il consacre  une partie de sa réserve parlementaire pour la ville. Où ? Au Port des Goudes (dans les  quartiers sud, fief de la droite, NDLR). Il pourrait se demander où on en a le plus besoin : à Saint-Louis, Saint-Antoine, La Savine (quartiers nord, NDLR) ? Jean-Claude Gaudin ne connaît plus sa ville. Il connaît l’autoroute pour aller à Saint-Zacharie (commune du Var où il réside, NDLR).

Il n’y a pas de politique municipale capable, seule, de redresser la ville. Ce qu’il faut, c’est du développement économique. Que faire en tant que maire ? S’inscrire dans la compétitivité territoriale. Créer un établissement foncier. Faire un travail de manager pour accueillir les entreprises. Bref, ce qui se fait partout. Demain, c’est la métropole qui décidera en matière de développement économique mais c’est le maire de Marseille qui aura la légitimité. Je m’y consacrerai totalement parce que je ne serai plus député.

En matière de transports, la métropole va toucher 50 millions de versement transport(VT) supplémentaires et l’aide de l’Etat sera de 50 millions. Si on fait un contrat de Plan avec le Conseil général et le Conseil régional, on peut dégager 130 à 140 millions supplémentaires. A partir de là, il faut faire un emprunt supplémentaire de 2 milliards : en consacrer 1,2 à l’intérieur de Marseille et 800 millions à l’extérieur. »

(Sur la proposition d’Eugène Caselli de demander à l’Etat de mettre deux milliards dans un fonds d’amorçage). « J’essaie d’être cohérent. L’Etat va déjà mettre 2,5 milliards sur la gare Saint-Charles pour la traversée souterraine de Marseille. Il ne donnera pas deux milliards à Marseille pour les transports même s’il mettra un peu d’argent. »

INSÉCURITÉ

« J’assume le fait que j’ai une réponse de gauche, que je suis fidèle aux convictions de mon courant politique qui a toujours estimé qu’à côté de la répression qui est indispensable, il faut s’attaquer aux conditions sociales qui déterminent la situation de la sécurité. Je suis sur la position qui est celle du parti socialiste et de la gauche en général depuis cent ans.

Manuel Valls ne croit d’ailleurs pas que l’on réglera les questions de sécurité à Marseille en ayant des positions policières. Les policiers pensent d’ailleurs la même chose. Pour moi, le problème est « simple »: nous avons, à Marseille, 30% de gens qui vivent en dessous du seuil de pauvreté. Dans le pays, c’est 15%. L’objectif de diviser par deux la pauvreté à Marseille conduit à limiter l’insécurité. Sur les Roms, je dis la chose suivante. Prenons des engagements avec la Commission européenne, qui finance très largement l’intégration des Roms, sur un certain nombre de familles que nous accueillerons, logerons et scolariserons. Une fois que l’on aura fait ça, on pourra voir qui veut s’intégrer ou pas.

Pour résumer, je pense que les réponses à l’insécurité sont d’ordre sécuritaire et d’ordre social. On doit apporter une réponse globale. Je note que la prévention est une responsabilité municipale dans laquelle l’équipe actuelle n’investit pas.

Je trouve toutes les propositions faites ces derniers temps (armée, drones, police montée) ridicules. Pour moi, quand Samia Ghali en appelle à l’armée, elle pousse un cri de désespoir. Elle est suffisamment au courant pour savoir que l’armée ne peut rien à voir là-dedans. Chaque fois que l’armée est intervenue, elle l’a fait sur la base d’une loi d’exception (au Brésil, dans les années 20 en Sicile). Donc, j’entends le cri mais ça commence à faire long…

Sur la légalisation du cannabis, non, je ne revois pas ma position. Mais je ne m’oppose pas à un débat public. Je pense que ça ne réglerait rien. Pour s’en assurer, il ne me parait pas scandaleux de mener un débat public. »

CLIENTÉLISME

« Ma définition ? C’est quand on sollicite ou obtient une prestation, un emploi, un logement en échange non de ses compétences ou de son droit mais du soutien que l’on apporte à la personne qui vous le donne. Je prendrai des mesures pour mettre fin à cela, comme des fiches de poste dans laquelle on décrit avec précision l’emploi recherché et la qualification nécessaire. On évite ainsi des recrutements au petit bonheur la chance. J’instituerai également des commissions pour l’attribution des logements sociaux et des places en crèche.

Qui est à l’origine du clientélisme à Marseille ? Jean-Claude Gaudin et Jean-Noël Guérini dans un autre cadre. Non pas que le système n’existait pas avant eux mais ils sont arrivés au pouvoir après les lois de décentralisation et ça s’est accéléré.
Avec FO, Gaudin a complétement laissé faire. Il y a désormais une « cogestion » de la ville. Je rappelle qu’au départ, Gaston Defferre est opposé à la création de ce syndicat et qu’il garde des hommes à lui au sein de la CGT. Puis quand il devient patron de la mairie, il voit en FO un syndicat « jaune ». Il s’en sert. Sous Gaston Defferre, FO n’est pas en cogestion. FO obéit à Gaston Defferre. C’est tout de même une nuance de taille. Il n’y a que sous Vigouroux que FO se comporte comme un syndicat normal. Puis, sous Gaudin, l’organisation syndicale prend le pas sur l’organisation politique. Beaucoup des choses que nous devons affronter tiennent à une période que l’on n’arrive pas à dépasser. Je ne dis pas que lorsque j’arriverai à la mairie, FO n’existera plus. Je dis qu’elle existera en tant que force syndicale, point.

Mais je répète : Gaudin n’est pas dans une logique defferriste parce que Defferre dirigeait FO. De la même manière, Guérini n’est pas dans une logique defferiste. Defferre organisait son pouvoir autour de barons mais il ne les humiliait pas. Il avait un rapport de « primus inter pares ». Guérini n’a jamais eu cette capacité politique car personne ne le reconnaissait comme « primus » par son intelligence ou son courage. Il a toujours été obligé de taper sur les gens pour les obliger à faire les choses. »

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Les candidats aux primaires PS au « banc d’essai » (3/4) : Samia Ghali

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Nous avons rencontré quatre des six candidats (les quatre premiers à s’être déclarés qui sont également ceux que les sondages placent en tête) aux élections primaires du PS dont le premier tour se déroule dimanche 13 octobre. Nous leur avons posé les mêmes questions articulées autour de trois grands thèmes (Inégalités-Insécurité- Clientélisme) qui se dégagent de cette campagne avec la volonté de creuser leur projet pour Marseille, en dehors de toutes considérations tactiques ou stratégiques. Publication par ordre alphabétique. Aujourd’hui : Samia Ghali, sénatrice, maire des 15e et 16e arrondissements.

 

Bio express

Née en 1968 à Marseille

Vice-présidente du conseil régional de 2004 à 2010

Marie des 15e et 16e arrondissements depuis 2008

Sénatrice depuis 2008

Son site: samiaghali2014.fr

 

Sa formule qui résume le projet : « Faire entrer Marseille dans la modernité.»

Sa première décision en tant que maire de Marseille : « Faire un état des lieux de Marseille, secteur par secteur, avec les maires d’arrondissements afin de savoir où on est dans cette ville. »

Les phrases-clés :

« Les inégalités entre le nord et le sud ont été créées par Gaston Defferre et Jean-Claude Gaudin est son vrai héritier. »

« Si vous voulez vous attaquer à la drogue, il faut autant sanctionner le client que le dealer. »

« Certains candidats qui dénoncent le clientélisme proposent des emplois en contrepartie de la campagne ou du vote. »

INÉGALITÉS

« Je suis une enfant de ces quartiers. Je suis née sous Gaston Defferre. Je sais comment on vivait. On était totalement abandonnés. Il a fallu onze morts écrasés par des trains avant que l’on construire un mur ! Aujourd’hui, un maire serait condamné pour cela. Donc, je dis, oui, que les inégalités entre le nord et le sud ont été créées par Gaston Defferre. De ce point de vue, Jean-Claude Gaudin est le vrai héritier de Gaston Defferre. Il a la même attitude. Ce que je dis sur Gaston Defferre heurte dans mon parti mais j’assume. Je ne vais jamais commémorer l’anniversaire de la mort de Gaston Defferre.

Je suis la seule à vraiment expliquer ce qu’est la fracture nord-sud. Que dans certains quartiers, ce n’est pas le quart de la population qui vit sous le seuil de pauvreté  mais la moitié. Que ceux qui vivent juste au-dessus de ce seuil ne sont pas plus riches.

En matière d’éducation, de décrochage scolaire, de santé, tous les feux sont au rouge. Tout est difficile, ici. Tout au long. Le projet ANRU au Plan d’Aou date de dix-huit ans. Ca fait dix-huit ans que l’on dit aux habitants qu’ils vont vivre dans de beaux logements. Ce n’est pas vrai. Qu’ils vont avoir une médiathèque. Ce n’est pas vrai. Un terrain sportif : ce n’est pas vrai. Pourquoi voulez-vous qu’ils continuent à croire ce qu’on leur dit. C’est bien d’avoir fait le Mucem et la Villa Méditerranée mais ne pouvait-on mettre quelques milliers d’euros pour, symboliquement, créer une médiathèque.

C’est le maire qui devrait se battre à Paris. Je suis allée voir plusieurs ministres. A chaque fois, je rencontrais Gérard Collomb (le maire de Lyon). C’est Jean-Claude Gaudin qui aurait dû être là. Nous, en tant qu’élus de terrain, on est obligés de jouer les pompiers. Ces quartiers sont une mine d’or pour la ville et on les laisse tomber par manque de vision. »

(Sur les transports)

« Je n’ai pas voté le plan présenté par Eugène Caselli  à la communauté urbaine. J’ai voté contre le tram rue de Rome. C’est facile de dire : on va faire le métro vers l’hôpital Nord. Pourquoi ne l’a-t-on pas fait, alors ?

J’ai écrit une lettre au premier ministre sur la question des transports. A Paris, ils ont eu 30 milliards d’euros. A Marseille, on ne récupère rien. La métropole va nous rapporter 15 millions d’euros par an pour 92 communes. Or, il nous faut 3 milliards d’euros pour rattraper le retard en matière de transports. J’ai demandé au gouvernement qu’il mette 250 millions par an pendant douze ans ».

INSÉCURITÉ

« Mon appel à l’armée était-il un cri ou une proposition concrète ? Je ne veux pas le prendre comme cela même si je ne regrette pas. Je m’explique : au moment où je l’ai dit, la situation était dramatique. Au pays des droits de l’homme, je ne peux pas entendre : « ils n’ont qu’à se tuer entre eux, ce n’est pas grave ». Comme on ne peut plus dire : « règlements de compte ».

Je n’ai pas demandé l’armée pour aller arrêter les dealers. Ceux qui viennent acheter  – des gens bien dans leur vie, des chefs d’entreprise, des avocats – participent du développement du trafic. Au moment où je l’ai dit, il y avait également la situation de la police (le scandale de corruption à la Bac nord, NDLR). Ce qui a déclenché mon appel, c’est la mort d’un jeune face au Lycée Nord. J’y étais et j’ai vu que les autres jeunes avaient peur. Cela faisait des années que je réclamais des effectifs supplémentaires de police. Mais tout le monde était dans le déni. Ce qui m’inquiétait, c’est la possibilité que certains en arrivent à l’autodéfense.

Marseille est le seul endroit où l’armée n’est pas dans les rues. Elle est sur les Champs-Elysées. Pas ici. La délinquance commence jeune ici. A cet âge-là, voir des uniformes peut avoir un effet dissuasif. Pour prendre la température d’un quartier, ce n’est pas idiot d’envoyer l’armée.

Pour autant, si on ne met en avant que du sécuritaire, on n’a rien compris. Il faut, en parallèle, je ne prends qu’un exemple, l’ouverture des écoles jusqu’à 19 heures. »

(Sur le statut pénal du cannabis) « Vous n’arrêterez pas les trafics avec la légalisation. Vous êtes face à des chefs d’entreprise. La délinquance s’est professionnalisée. Et on fera quoi de la coke et de l’héroïne ? Si vous voulez vous attaquer à la drogue, il faut autant sanctionner le client que le dealer. Il faut aussi se demander : pourquoi les Français consomment autant ? »

CLIENTÉLISME

« Je n’utilise pas le mot, en effet. C’est une hypocrisie. C’est quoi le clientélisme ? En fonction de qui ça concerne. Quand c’est dans certaines classes, on se rend service. Quand c’est pour les pauvres, c’est du clientélisme.

Le clientélisme ne se combat pas avec des mots. Il se combat en apportant, par exemple, du logement pour tous.

Je reçois une cinquantaine de personnes par semaine. J’ai, en attente, 500 demandes de rendez-vous. Quand les gens sont à la rue, n’ont plus de quoi manger, il ne faut pas les aider parce que c’est du clientélisme ?

Par contre, dans certains catégories sociales, cela s’appelle du relationnel quand on appelle un ami pour trouver un stage à son enfant.

Le clientélisme, c’est comme le FN, c’est le désespoir de la population. Marseille est aussi, d’une certaine façon une république bananière. C’est cela qu’il faut changer.

Je défie quiconque de dire que je fais du clientélisme. Encore que peut-être… lorsque j’aide les gens, on peut dire que je fais du clientélisme. J’assume mon rôle d’élu de débrouiller des situations.

Certains candidats qui dénoncent le clientélisme proposent des emplois en contrepartie de la campagne ou du vote.

(Question: Vous avez des noms à donner ?) Réponse: Non. »

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Les candidats aux primaires PS au « banc d’essai » (2/4) : Eugène Caselli

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Nous avons rencontré quatre des six candidats (les quatre premiers à s’être déclarés qui sont également ceux que les sondages placent en tête) aux élections primaires du PS dont le premier tour se déroule dimanche 13 octobre. Nous leur avons posé les mêmes questions articulées autour de trois grands thèmes (Inégalités-Insécurité- Clientélisme) qui se dégagent de cette campagne avec la volonté de creuser leur projet pour Marseille, en dehors de toutes considérations tactiques ou stratégiques. Publication par ordre alphabétique. Aujourd’hui : Eugène Caselli, président de la communauté urbaine de Marseille.

Bio Express

Né en 1946 à Marseille

Cadre bancaire

Président de la communauté urbaine de Marseille depuis 2008

Site : caselli2014.fr

Sa formule qui résume le projet : « Mettre de l’égalité dans cette ville.»

Sa première décision en tant que maire : « Nommer un ou une première adjoint(e) chargée de l’emploi et de la formation des jeunes. »

Les phrases-clés :

« Le système clientéliste, beaucoup en parlent. Moi je l’ai vécu et je l’ai combattu à la communauté urbaine.»

« L’absence de métropole, c’est une erreur de Gaston Defferre. Il a été un grand maire mais il a raté un virage.»

« Sur le cannabis, je dis aujourd’hui que le débat mérite d’être posé et que je suis en réflexion sur ce sujet. »

 

INÉGALITÉS

« Cette ville est profondément inégalitaire, c’est son problème. Mon projet, c’est de réunifier le nord et le sud, la ville qui réussit celle qui est aux prises avec des problèmes économiques, urbains et sécuritaires. Cet aspect inégalitaire, je n’en avais pas autant conscience quand j’ai été élu président de la communauté urbaine en 2008. Je l’ai découvert au fil des années et je le découvre encore plus dans le cadre de cette campagne des primaires.

Il y a dans cette ville une vraie fracture sociale. Il suffit de dresser quelques constats. Le grand oublié de Marseille Provence 2013, c’est quand même le nord de la ville. Combien de piscines actives, de terrains gazonnés, de grandes infrastructures,  dans les quartiers Nord ? Depuis les zones franches, quel est le geste important qui a été fait pour les quartiers nord ?

Où sont les responsabilités ? En partie la gestion de dix-huit ans de la mairie de droite qui, en dehors de la création des zones franches, s’est peu préoccupée des quartiers en difficulté. C’est également la responsabilité des gouvernements depuis quarante ans, de gauche comme de droite, qui n’ont pas pris la mesure de la dérive urbaine de certains quartiers en pensant que les éléments de la politique de la ville s’avéreraient suffisants pour maintenir un amortisseur social.  Ils se sont trompés. Peu à peu, une économie parallèle s’est développée qui est devenue une industrie du trafic de drogues.

Autre erreur : l’absence de métropole, contrairement à Lyon, Lille ou Bordeaux, dans les années 60. Cela a été l’une des erreurs de Gaston Defferre. Il a été un grand maire mais il a raté un virage essentiel. Les deux-tiers de l’argent donné par l’Etat à ces communautés urbaines ont été investis dans les transports, ce qui a permis à ces villes d’avoir un réseau cohérent. Or, l’absence de réseau de transports digne de ce nom constitue, ici, un frein à l’emploi.

Marseille souffre d’une situation exceptionnelle. A situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles. Je propose de créer des zones socialement prioritaires (ZSP) dans six arrondissements de la ville plus dans quelques zones du sud-est. Tous les emplois des entreprises et commerces doivent y être défiscalisés. Cela créerait un appel d’air. C’est le principe des zones franches mais qui s’applique sur l’existant. Cela permettrait la création de milliers d’emplois assez rapidement. Ca, c’est l’urgence. Ensuite, il y a le plus long terme avec la métropole qui doit nous permettre de créer 100000 emplois (dont 50 à 60000 à Marseille) dans les dix à douze ans.

Il faut constituer un grand système de transport cohérent. Avec le prolongement du métro jusqu’à l’hôpital Nord et Dromel. Avec des TER en plus grand nombre dans les quatre grands couloirs (Marseille-Aix, Marseille-Aubagne, Marseille-Fos et Marseille-aéroport). Seule la métropole aura les moyens de bâtir ce système. Je demande à l’Etat de verser deux milliards d’euros dans un fonds d’amorçage. Je dis à l’Etat de faire comme pour le grand Paris. L’Etat n’a pas versé trente milliards pour le grand Paris, comme il se dit trop souvent, mais il a amorcé avec deux milliards. Ensuite, les autres collectivités ont complété. »

INSÉCURITÉ

« La réponse est globale. Le problème, c’est toujours l’égalité. Problèmes d’emplois, d’éducation, d’accès à la culture, aux transports. Ces réponses ne peuvent être immédiates. Elles sont sur le moyen et sur le court terme. Il faut aussi des réponses en matière de sécurité relativement rapides. Là aussi, à situation exceptionnelle, réponse exceptionnelle : pourquoi n’y aurait-il pas un policier municipal pour 1000 habitants à Marseille comme il y a à Lyon ?

Je pense que Marseille doit être le laboratoire des nouvelles technologies policières. Je sais que l’idée d’utiliser les drones fait son chemin dans la tête des experts. C’est un élément de renseignement important. Ce n’est qu’une caméra de vidéosurveillance aérienne. Or, le débat que l’on a eu sur la vidéosurveillance, il y a dix ans est désormais clos.

(Sur le statut pénal du cannabis) Je dis aujourd’hui que le débat mérite d’être posé et que je suis en réflexion sur ce sujet. Avant, j’étais tout à fait opposé à la dépénalisation. Aujourd’hui, je suis en réflexion. Le phénomène est d’une telle ampleur que les réponses traditionnelles ont leur limite. Il faut trouver d’autres outils. La dépénalisation peut en être un. Je ne dis pas que je suis pour car je n’ai pas affiné ma réflexion. Mais le fait que j’y réfléchisse beaucoup, ça veut bien dire que l’argument commence à faire mouche dans ma tête. »

CLIENTÉLISME

« Je ne parle pas d’un système de services ponctuels que tous les politiques connaissent. On peut, en effet, rendre un service de type social à des familles en difficulté. Le problème, c’est quand un système devient industriel. Quand on rend service à des individus, on leur demande de faire voter des familles entières pour un candidat. Quand tout cela est fait à l’échelle de groupements d’élus ou de collectivités. Quand les affaires s’ajoutent au système clientéliste, ce n’est plus tolérable, il faut y mettre fin. Il faut passer d’un système de passe-droits permanent qui est en train de s’institutionnaliser à un système de droits pour tous. Je précise que le système clientéliste, beaucoup en parlent, moi je l’ai vécu et je m’y suis opposé à la communauté urbaine en luttant contre l’intrusion, en étant victime de certaines grèves anormales.

Je formule deux propositions :

–         Renouveler la classe politique. Je réserverai la moitié de mes listes à la société civile. Ce qui ne veut pas dire qu’il ne s’agira que de chefs d’entreprise ou de grands patrons.

–         La création de trois grandes commissions (emplois publics, crèches, logements) composées à parité droite-gauche. La commission des emplois publics doit être présidée par un membre de l’opposition.

Cet autocontrôle mettra fin au clientélisme car les élus sur le terrain n’auront plus le pouvoir.

(Sur le defferrisme) Defferre a transformé la ville. Il a aussi fait des erreurs. Il est resté trente-trois ans, il a donc marqué plusieurs générations. Je dis maintenant qu’il faut sortir de l’après-guerre qui est encore dans les têtes dans les fonctionnements. FO est en train de sortir de l’après-guerre. Le procès de Mennucci à FO est complétement daté. Ce syndicat est en train de faire sa mue. Le processus a été engagé il y a environ deux ans. A la communauté urbaine, j’ai largement fait évoluer les choses dans le sens de la transparence et d’un dialogue social beaucoup plus construit. »

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Les candidats aux primaires PS au « banc d’essai » (1/4) : Marie-Arlette Carlotti

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Nous avons rencontré quatre des six candidats (les quatre premiers à s’être déclarés qui sont également ceux que les sondages placent en tête) aux élections primaires du PS dont le premier tour se déroule dimanche 13 octobre. Nous leur avons posé les mêmes questions articulées autour de trois grands thèmes (Inégalités-Insécurité- Clientélisme) qui se dégagent de cette campagne avec la volonté de creuser leur projet pour Marseille, en dehors de toutes considérations tactiques ou stratégiques. Publication par ordre alphabétique. Aujourd’hui : Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée aux personnes handicapées et à la lutte contre l’exclusion.

 

Bio Express

Née en 1952 à Béziers

Cadre dans l’industrie aéronautique

Députée européenne de 1996 à 2009

Conseillère générale depuis 1998

Elue députée en juin 2012 face au sortant UMP Renaud Muselier

Site : Carlotti2014.fr

Sa formule qui résume le projet : « Je veux déclarer la guerre à la pauvreté et à la précarité, ni avec des chars d’assaut, ni avec des drones, mais avec de la création d’emplois. »

Sa première décision en tant que maire : « Réunir un comité de sécurité restreint avec l’ensemble des partenaires, comme je le ferai chaque lundi. Les deux facettes – répression et prévention –seront représentées. »

Les phrases-clés :

« A Saint-Barthélémy, ils n’ont jamais vu Jean-Claude Gaudin de leur vie. »

« Vous m’avez posé une question sur l’insécurité, je vous parle beaucoup d’emploi, car c’est ma réponse. »

« Ce système clientéliste n’est ni de droite, ni de gauche. Il est partout. »

 

INÉGALITÉS

« Il y a deux villes, certes, mais je dirais que Marseille est plus éclatée encore : elle est en mille morceaux. C’est une ville à plusieurs vitesses. Certes, les quartiers nord ont été trop longtemps laissés à l’abandon mais la pauvreté et la précarité sont partout dans la ville.

Je ne suis pas d’accord avec l’idée que Gaston Defferre a abandonné les quartiers nord. L’hôpital Nord, l’hôpital Lavéran, c’est qui ? Les grandes infrastructures, c’est Defferre. C’était une période positive, faste. Avant, même les jeunes qui n’avaient pas de qualification trouvaient du boulot. La responsabilité, c’est que depuis trois mandats, rien n’est fait. Ces quartiers ont été abandonnés alors qu’il y a un potentiel : toutes les villes-ports sont en train de redémarrer, sauf Marseille. J’étais dans le quartier de Saint-Barthélémy, il y a peu : ils n’ont jamais vu Jean-Claude Gaudin de leur vie. Ce n’est pas le Marseille qu’il aime. Le Marseille qu’il aime, c’est le Marseille de la Provence ancienne. Et puis, il faut aussi balayer devant sa porte : les élus (socialistes, NDLR) de ces quartiers ne se sont pas toujours bien comportés. »

(Sur les transports) « On vient de se doter d’un outil : la métropole. Jusqu’ici, le débat a porté sur l’institution. Cela a créé des clivages qui ne sont pas de vrais clivages, sur le fond. Le débat de fond sur la métropole commence maintenant : quelles politiques mettre en place ? Maintenant, les clivages vont changer. Rien ne pourra se faire sans le développement des transports en commun. Nous sommes la seule ville qui n’a pas fait reculer la voiture. Je formule un certain nombre de propositions (bus en sites propres, un VAL vers l’aéroport, interdiction des poids lourds, pistes cyclables, mise en place de la billetterie unique). Bien sûr que j’ai envie de dire oui à la gratuité mais j’ai d’abord envie de voir comment développer des tarifs sociaux afin de  ne pas mettre en péril financier la ville et la RTM.

Quant aux financements, il y a peu de marges. Vous avez vu le rapport de la chambre régionale des comptes sur l’endettement de la ville ? Certains projets (gare Saint-Charles, L2) seront financés par l’Etat. On trouvera aussi des financements via la RTM. Je propose la réorientation vers des projets moins coûteux : je ne propose pas une grande extension du métro car cela coûte très cher. Les transports en site propre (bus et tram), c’est moins onéreux. Je regarderai tout de même comment étendre le métro jusqu’à l’hôpital Nord et vers la technopôle de Château-Gombert. »

 

INSÉCURITÉ

« Intraitable contre l’insécurité et contre les causes de l’insécurité : telle est mon approche. Il y a des systèmes mafieux qu’il faut démanteler. Il faut continuer à développer le renseignement, comme le fait Manuel Valls, développer la police judiciaire et avoir des forces de police nationale. Je souhaite également que le maire ne se déresponsabilise pas. Je propose de tripler les effectifs de la police municipale : nous serons alors au même niveau, en rapport de la population, que Nice et Lyon.

Je n’oublie pas l’essentiel : la question sociale. L’insécurité naît de la pauvreté, du désarroi de jeunes qui sortent du système scolaire sans formation, auxquels on ne propose rien. Les emplois d’avenir, c’est un moyen parmi d’autres de remettre le pied à l’étrier. Le maire actuel ne veut pas, par idéologie, créer le moindre emploi d’avenir dans la ville. 12000 jeunes sont allés au Pôle Emploi pour dire : on veut un boulot, on n’est pas des glandeurs. Nous engageons, au niveau national, la réforme de la qualification professionnelle. Je veux également soutenir l’économie sociale et solidaire.

On ne créera plus d’emplois publics. Il nous faut surtout de l’emploi privé : il faut en créer 100000 emplois en dix ans à l’échelle de la métropole. 4000 emplois peuvent être créés, me dit-on, dans la réparation navale avec la forme 10. Je prends. La métropole sera la plateforme indispensable pour démarrer ce combat pour l’emploi. Vous m’avez posé une question sur l’insécurité, je vous parle beaucoup d’emploi, car c’est ma réponse.

(Sur le statut pénal du cannabis) « Ce serait un mauvais signe qui pourrait apparaître comme du laxisme. »

CLIENTÉLISME

« C’est un système de petits arrangements entre amis, de « combinazione », qui sert les copains, les cousins, les proches, en échange de quelque chose. C’est un système qui asservit les citoyens, qui ne fonctionne pas parce que la ville est pauvre et qui détourne nos politiques publiques. Exemple : il manque de logements sociaux à Marseille. Quand on en construit un, à qui le donne-t-on ? A quelqu’un qui a un piston. Or, 30000 familles attendent un logement social. Pareil pour les places en crèche. Le clientélisme, c’est donner des choses aux gens alors qu’ils y ont droit.

J’y suis opposée pour trois raisons :

–         Pour des raisons morales et éthiques

–         Cela pollue nos politiques publiques

–         Pour l’atteinte à l’image de Marseille. On a l’impression que c’est notre atavisme. Ca ne l’est pas.

Les Marseillais n’en veulent plus.

(Sur les origines du clientélisme). Je ne sais pas. Je n’étais peut-être pas née. Vous voulez dire sous Gaston Defferre ? Il est peut-être né dans l’après-guerre. La solidarité est devenue ensuite l’accompagnement. Ce que je sais, c’est qu’aujourd’hui, plus la ville est en crise, moins cela marche, moins c’est efficace. Or, il se trouve qu’il y a des élus qui ne savent faire que cela, que répondre à des doléances. Je comprends qu’il faille répondre à nos concitoyens mais la réponse est de mettre en place des politiques publiques et on ne demande rien en échange. Je veux créer des emplois pour tous, pas pour mes amis.

Ce système, tout le monde en a profité, à tour de rôle. Ce système n’est ni de droite, ni de gauche. Il est partout. Quand il n’y a pas de politiques publiques cohérentes, égalitaires, pour tous, on remplace par le clientélisme. Cela devient un tic pour des élus qui ne savent pas faire de la politique autrement que par le piston. »

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Petites leçons d’un sondage

En général, le plus instructif dans les sondages ne fait jamais les gros titres. Il en va ainsi de l’enquête réalisée par l’IFOP et publiée dimanche 8 septembre par le Journal du dimanche.

Restituons d’abord les grandes lignes : Jean-Claude Gaudin est donné vainqueur avec 34% au 1er tour et 40% au second tour. Le FN arriverait en deuxième position lors du 1er tour (25%) et 22% au second tour. La liste PS n’obtiendrait que 21%, un recul de 2 points par rapport à un sondage réalisé en juillet. Le Front de gauche est crédité de 9% et les Verts de 7%.

Par ailleurs, les candidats à la primaire socialiste sont testés auprès des personnes ayant déclaré leur sympathie de gauche. Marie-Arlette Carlotti s’attire leur préférence (25%) devant Samia Ghali (24%), Patrick Mennucci (13%) et Eugène Caselli (10%). Parmi les sympathisants socialistes, quelques variations: Carlotti (33%) devant Ghali (17%), Christophe Masse (14%) et Mennucci (13%).

Ceci posé, quelles « révélations » trouve-t-on dans les « ventilations » du sondage (à lire ici : http://www.ifop.fr/media/poll/2323-1-study_file.pdf) , en posant une borne de prudence liée à l’échantillon (702 personnes) et à la marge d’erreur inhérente ?

– L’importance déterminante du vote senior

C’est une dimension qui est généralement ignorée : si Marseille est une ville jeune, elle est également, par rapport à d’autres métropoles française, une ville où la proportion des plus de 65 ans est la plus forte. Notons que de ce point de vue aussi, Marseille est « polarisée » et que les salariés de 35-50 ans qui forment le socle des grandes villes françaises est ici le « maillon faible » même si ces dernières années, la ville rattrape son retard.

Qu’induit électoralement, cette donnée sociologique ? Pour aller vite : surreprésentation des retraités = plus fort vote de droite. Pour rappel utile : en 2007, lors de la présidentielle, hors « vote senior », Ségolène Royal devançait Nicolas Sarkozy…

Dans le sondage, 37% des retraités disent choisir Gaudin et 31% Ravier, la tête de liste du FN. Cela signifierait que, localement, le parti de Marine Le Pen grignote (plus que cela, même) la droite, Sarkozy ayant, en 2012, maintenu son score de 2007 parmi cette classe d’âge, fidèle parmi les derniers fidèles du sarkozysme… Au second tour, le vote des plus de 65 ans permet à Gaudin de devancer la liste de la gauche alors qu’il est battu dans le reste de la population.

On retrouve cette composante « senior », de manière peut-être plus surprenante encore, dans les résultats concernant la primaire socialiste. Si l’on ne prend en compte que les électeurs de moins de 65 ans, Samia Ghali devance Marie-Arlette Carlotti, largement d’ailleurs parmi les 35-49 ans (36% contre 19%) et les employés (36% à 20%). Ce qui fait la « bascule » pour la ministre ? Les plus de 65 ans : 32% pour « M.A.C », 4% pour la sénatrice et maire des quartiers nord. Le différentiel est tel qu’il faut se demander si une frange de l’électorat de gauche est bien à l’aise avec l’idée d’être représentée par une femme au nom à consonance arabe ! Ou alors anticipent-ils un rejet du reste de l’électorat.

–         Le FN et le vote ouvrier

C’est devenu la tarte à la crème de quelques politologues et éditorialistes : le FN, parti de la classe ouvrière. On ne démontera pas ici et maintenant, en long et en large, la supercherie. Il suffit de se pencher sur les petites lignes du sondage. Précisons qu’aucune donnée sur l’abstention n’est disponible, ce qui relativise ce qui va suivre. Mais tout de même. Au 1er tour, les trois listes de gauche recueillent 43% des ouvriers, la liste Gaudin 36% et celle du FN 21%. Au second tour, la liste unique de la gauche passe à 46%, celle de la droite passe à 41% et celle de l’extrême-droite tombe à 13%. Le FN résiste mieux, en revanche, parmi les employés (31% au 1er tour, 28% au second) même si la gauche arrive en tête (38% contre 34% à Gaudin).

Voilà posées deux petites pierres d’analyse que nous retrouverons, sans aucun doute, au long de notre chemin vers l’élection municipale de mars 2014.

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